Découvrez le nouvel album de Clarika
« ce soir je sors »
Comme une petite nièce de Souchon, Clarika déballe un sens de l’écriture agile
Clarika a du savoir-faire
Un grand disque
Cette femme a le talent de l’autodérision
Clarika chante vrai
Bravo madame
DANSE ENCORE
Danse encore : c’est un refus de l’immobile et de l’essoufflement. Le titre du neuvième album de Clarika traduit un geste d’obstination, un désir, le vœu de rester en mouvement. Danser encore, même si le sol tremble. Sans frein, danser au-dessus de l’anxiété générale et des petits tracas. Danser avec les figures familières, et les nouvelles. Faire valser nos intimes et en reconnaître la poésie, même simple, même inaperçue.
Danser encore, c’est aussi, pour la chanteuse, ne pas se lover dans l’assise confortable qu’offrent trente ans de carrière. C’est poursuivre, oui, mais marquer la rupture : pour cet album et pour la première fois, Clarika a écrit et composé. C’est nouveau, et n’avait jamais été pour elle l’enjeu d’une nécessité. Jusqu’ici, elle avait préféré s’entourer de compositeurs de confiance (JeanJacques Nyssen, Fred Pallem…), dont elle avait tiré de fières collaborations. C’est venu presque sans crier gare : d’un essai l’envie, puis la frénésie, l’excitation, la joie d’apprendre et de créer avec de nouvelles armes. C’était soudain ouvrir des brèches dans l’univers connu. Cette ivresse, ce risque incertain, vacillant et furieusement libre.
L’impulsion de composer, forcément, met les habitudes en vrac. L’écriture progresse autrement devant le petit synthé ; textes, musiques et harmonies avancent ensemble et se déploient mêlés. Aussi, les riffs et mélodies qu’elle soumet à Fred Pallem, avec qui elle avait déjà collaboré pour De quoi faire battre mon cœur(2016), comme base de travail lui permettent une autre forme d’implication dans la réalisation de l’album. Elle ne livre plus simplement du texte : elle suggère l’armature du disque.
Dix compositions sur l’ensemble des douze chansons sont les siennes. Pendant les dix jours de studio alors, Clarika veille, donne des directives, prend part à la réalisation. Il semble que sa légitimité était là, enfouie sous les années à écouter les autres faire. Et les choix musicaux sont encore le signe d’une quête de renouveau. Avec Pallem, ils optent pour un style épuré aux accents électro, qui fait bouger les lignes du répertoire. Pallem arrange les compositions dans des boucles et des ostiano, il travaille aux machines et limite les instruments acoustiques. Seul.es Ornette (clavier, piano et chœurs), Emiliano Turini (programmation, batteries) et Fred Decès (mixeur, collaborateur de Jeanne Added, Ichon, Izia) passent les portes du studio. Si les albums précédents sont marqués par la présence organique d’instruments variés, Danse encore tient sur un fil, avec peu d’instruments additionnels (Rémi Sciuto au saxophone), et des synthés, des séquences, des cordes synthétiques.
Clarika danse encore, suspendue au-dessus du vide. Les textes ont de cela, d’une persistance dans le chaos. “Ce soir je sors” est une fronde impertinente au milieu de ce qui s’écroule. Les paroles puisent dans une constellation d’images, mélange d’observations et d’évocations intimes, tantôt rêve, tantôt cash (“Des mouettes sans l’odeur de la mer / Saluent de haut un pigeon mort / Je cours encore”).
Sa plume continue de s’ancrer dans cette sorte d’acuité rieuse. Elle s’amuse comme ça, frôle l’insolence dans “Seule la mort” et insulte sa bien-aimée cigarette délaissée dans “Adieu salope” – composée par Fred Pallem.
Clarika a son degré à elle, une légèreté clairvoyante. Parfois, ce n’est pas l’humour mais une poésie franche. Ainsi salue-t-elle Isadora Duncan, pionnière de la danse contemporaine, décentrant le tragique de sa mort prématurée et lui intimant de danser encore. Ou bien faitelle couler la Seine sous le pont Saint-Michel pour dire le massacre des algériens du 17 octobre 1961 par les autorités françaises, dans “Ce jour-là”. Écrire, pour elle, n’est pas synonyme d’engagement politique, ni de dévoilement de la vie privée. Les thèmes abordés sont ceux qui touchent au cœur, d’abord. Mais si les mots ont des effets, c’est bien qu’ils tendent vers leur partage. Dans “Sans les nuages”, elle demande ce que peut bien révéler la brume qui se dissipe. Où est le vent, écrit-elle, quand on a pu le trouver dans un chagrin désormais aboli – prend-t-il corps ailleurs, dans cette épopée musicale ? On entend, bien sûr, des échos d’albums antérieurs. Sa sensibilité poétique fait le liant entre les morceaux. Mais la tangente est prise, la trajectoire a dévié ; des amours restent dans la zone endeuillée de la mémoire (“Souviens-toi d’après”) et laissent place à d’autres élans, de la douceur consolatrice de “Ferme les yeux” au fantasme de la peau recouverte de “Rhabillez-moi”, clin d’œil à Juliette Gréco soit dit en passant.
Danse encore célèbre trente ans de carrière. Pour l’occasion, Clarika retrouve Luc, le meilleur pote qui l’accompagne en choubidous depuis l’album Ça s’peut pas (1996) et perdu de vue avec ce temps-là, aussi vintage que la “fumée des Camel”, les “talons noirs”, les “cheveux bleus” et les arrangements du morceau “Salut Luc”. Elle choisit également de reprendre “La Méduse”, écrite en 1999, composée et chantée alors par JeanJacques Nyssen. Trente ans, c’est aussi le bon prétexte pour inviter sur l’album des proches à déclamer en chœur qu’ “On va s’en sortir” (sur “Ce soir je sors”), comme une horde dans l’affront. Dans les voix du refrain, on compte de nombreux ami.es et collaborateur.rices de projets variés, tournées et spectacles (Emmanuel Pitois, Jean-Jacques Nyssen, La Grande Sophie, Jérémy Ponthier, Mika Apamian, Yann Lambotte, Emmanuel Noblet, Maissiat, Myriam Joly…) mais également ses filles ou le “président de son fan club”.
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LA PRESSE
Can You Hear The Music – Clarika : un 8ème album à la fois doux et engagé
C’est un 8ème album plein de force que dévoile Clarika avec A la lisière. Sorti le 8 mars dernier, A la lisière est un album doux et joyeux qui sait aussi être mélancolique et engagé. Dès la 1ère piste, le [...]